Nicolas39 - Pêche à la mouche

La pêche à la mouche sur le blog de Nicolas Germain, un Jurassien amoureux de sa rivière, la Haute Rivière d'Ain.
Centre de pêche en Bosnie.

Accès au Fly Shop Signez le livre d'or Suivez-moi sur facebook Le Fly Shop sur facebook

Mot-clé - Ombre commun

Fil des billets - Fil des commentaires

dimanche 25 avril 2021

L'hécatombe continue sur la Loue

C'est la triste suite de ces dernières semaines. Malheureusement, la situation ne s'améliore pas du tout sur la Loue. De nombreux pêcheurs alertent sur les mortalités récurrentes. Même les passants voient les ombres dériver dans la ville d'Ornans. C'est une véritable hécatombe. 

2010, c'était la première manifestation à Ornans. Et depuis, qu'est-ce qui a réellement changé sinon rien ? La rivière, nos rivières se dégradent toujours autant. Les truites et les ombres disparaissent peu à peu. Rien de significatif n'a été fait au final. En tous les cas, rien qui ne soit visible sur la qualité de l'eau de nos rivières.

C'est triste, mais on va finir par souhaiter qu'un baigneur ou un touriste en canoé s'empoisonne avec ces eaux. Ils arrivent, j'en ai déjà vu sur les gravières de la rivière d'Ain. Ils vont prendre possession des lieux. Ils vont jouer avec cette eau qui tuent les poissons. Si l'hécatombe des poissons se transforme en hécatombe de baigneurs, peut-être que...

samedi 6 mars 2021

2 jours sans muselière. Vive Goumois, vive la pêche !

Le mot muselière est sans doute un peu fort, mais la perspective de passer deux jours sans mettre de masque me remplissait de joie ! Il en faut peu de nos jours pour rendre un homme heureux. Le spectre d'un futur confinement partiel ou plein a fini par me décider de prévoir un séjour sur Goumois pour faire mon ouverture. La dernière que j'ai fait sur les terres de la Franco-Suisse datait de 2013 en compagnie, en autre, de mon ami Michel Flénet. Il manquera tristement sur les berges du Doubs cette année et les suivantes, assurément.

C'est comme une veille d'ouverture et un peu comme un gosse que j'ai préparé mes affaires. J'avais un besoin fou de m'éloigner de mon quotidien et plus particulièrement de mon étau. Une immense envie de me retrouver seul canne à la main s'était emparée de moi. Les paysages de la vallée du Doubs étaient le cadre parfait pour palier mes envies de solitude en plein air.

Les fleurets au fond du sac et c'est parti !

Je vous avoue que malgré toutes les idées positives que j'avais en tête, le trajet pour me rendre sur Goumois m'a fait froid dans le dos. Je n'ai pas comptabilisé les parcelles noircies de lisier, mais c'était pas chouette à voir et accessoirement à sentir. Même dans nos rêves les plus joyeux, la réalité de nos vies nous rattrape inexorablement.

Arrivé le long du Doubs et pas encore équipé, je devine une silhouette de pêcheur tenant sa canne de la main gauche ! L'ami Alex était déjà en approche. Nous avons eu la même crainte d'un possible confinement. Il fallait pêcher, quoi qu'il en coûte ! J'ai abandonné Alex à ses petites affaires où il excelle comme personne pour attaquer un peu plus en aval. Je n'en crois pas mes yeux, le Doubs est somptueux ! La belle crue hivernale a fait le boulot. C'est splendide.

Le fond du Doubs.

Cette vallée reste unique en son genre. On y respire l'esprit encore sauvage. Je le disais encore ce matin à mon ami Denis, la rivière d'Ain est magnifique, mais elle n'a pas cet aspect sauvage du Doubs. En tous les cas, je ne le retrouve pas personnellement. L'ambiance est totalement différente.

L’entrée du bois de la Saulsotte.

Les stigmates de la dernière crue !

La pêche dans tout ça. Il a fallu attendre patiemment l'ouverture légale de la truite pour les tenter de nouveau. Bien qu'ayant une deuxième catégorie à portée de voiture, je me refuse d'aller embêter les truites lors de leur période de repos bien méritée. Ces longs mois à attendre et enfin, le jour J est arrivé. J'ai débuté très fort ! J'étais monté en 16 centièmes et gammare JFD en 12. Je pensais débuter la saison chez moi. Pas vraiment conseillé pour le Doubs et ses truites hypers méfiantes du début de saison ma combinaison diamètre de fil taille de nymphe. Pourtant, sur la première truite vue, elle est venue prendre le gammare comme une fleur. Un beau poisson de 40-45 qui aurait pu être le premier. C'était sans compter sur un ferrage bien rouillé ! Manqué ! Je vois encore le blanc de la gueule, magnifique et tragique ! Je me suis marré tout seul tellement j'ai été mauvais !

Derrière, je repère une truite sous son caillou. Elle n'était pas calée, mais en poste tout en restant sous sa cache. J'ai passé mon gammare plusieurs fois sans réaction de sa part. Heureusement, j'avais les sparklers magiques de mon ami Julien Daguillanes. Premier passage assez près du caillou et la truite est sortie comme une folle furieuse pour s'emparer de ma guirlande ! Quelle scène !

Première truite de 2021.

J'ai passé un très bon moment. Le peu de connaissances que j'ai de ce parcours est très préjudiciable lorsque les truites sont si peu actives. Il faut connaitre les bonnes berges, les bons moments. J'ai eu l'impression de tout faire à l'envers mais là n'était pas l'essentiel. Non, le poisson n'est que la cerise sur le gâteau. Le fait de me trouver sur les berges du Doubs était amplement suffisant. J'ai eu le plaisir de croiser l'ami Marcel avec qui j'ai passé un agréable moment bien qu'il m'ait appris la disparition peu après Michel de notre ami commun Yvan. Un autre passionné du Doubs maintenant disparu. Pour les plus anciens et amateurs du forum Mouche-Fr, vous le connaissiez sous le pseudo Doubsrivière. Bien triste nouvelle.

J'ai aussi, pour mon plus grand plaisir, croisé la route de mon ami Bruno. Un homme et pêcheur incroyable connu alors que j'étais le tout jeune disciple d'André Terrier. Comme je sais qu'il t'arrive de me lire mon cher Bruno, j'ai été très heureux de te revoir. Merci pour ce bon moment passé en ta compagnie.

Après avoir promené la canne plusieurs heures, j'ai retrouvé un semblant de motivation alors que la pluie tombait. Je suis allé finir ma journée sur le pré Bourrassin vide de pêcheurs. Enfin si j'ose dire, car il y en a eu un paquet de passage durant cette journée. Heureusement pour moi, il m'ont laissé cette belle fario qui s'est laissée leurrer à distance par un petit gammare JFD en 16. Je suis descendu pour l'occasion en 13 centièmes.

Belle truite du Doubs.

Le lendemain matin, j'ai attaqué beaucoup plus tôt. Le Bourrasin était pour moi seul ! Ce lieu reste enchanteur. L'atmosphère y est particulière.

Le pré Bourrasin.

Les truites dehors étaient encore moins nombreuses que la veille. La journée s'annonçait compliquée. La seule truite vue sur la gravière s'est emparée de mon petit gammare noué la vieille. Pas capot, c'est déjà pas rien !

Truite prise en nymphe à vue.

Il y a eu, au contraire de la veille, une activité de surface vers 14 heures déclenchée par une éclosion de petites olives. J'ai vu quelques très beaux gobages mais je n'ai pas eu le courage de reprendre la voiture pour aller sur la berge suisse. De plus, j'ai vu un pêcheur pratiquer le long des zones boisées. Pour se placer correctement pour pêcher les gobages, il se positionnait à chaque fois dans l'eau. Et comme j'ai compris la phrase du règlement intérieur qui stipule l'interdiction de renter dans l'eau avant le 1er Juin, je me suis abstenu.

Malgré ça, j'ai pris une truite en sèche devant les blocs de l'ami Radix avec une passe-partout olive. J'ai décroché un autre poisson que j'ai fait monter à la limite de la distance à laquelle je pouvais propulser ma mouche. J'ai également pris deux méchants refus !

Le Doubs reste magnifique malgré les malheurs qui lui tombent sans arrêt sur la tête. Je suppose, un peu comme chez nous, que le fond de la rivière va se transformer dans les semaines à venir. Ce que j'ai vu dans les champs devrait finir dans la rivière. C'est inévitable et tellement triste.

Les perces-neige de la Franco-Suisse.

Si le lisier était le seul mal qui touche cette rivière à l'image des autres rivières du coin, mais non. Là, sur le plat de la Verrerie, 4 harles bièvres sur une frayère d'ombres (cliquez sur la photo pour l'agrandir). Je les ai vu faire. Un mâle et 3 femelles. Ils n'ont qu'à en manger un chacun par jour durant la période du frai...Je vous laisse faire le compte. Les ombres eux étaient en stress absolu. Un autre sujet à considérer sur les baisses de population, c'est indéniable.

Je suis rentré à la maison avec le plein de bol d'air. Qu'est qu'on respire mieux sans ce maudit masque ! Vive Goumois, vive la pêche !

jeudi 12 novembre 2020

Quelques news du SC FlyShop !

Parmi mes partenaires de longue date, il y a le SC FlyShop dirigé de main de maître par l'ami Sylvain. L'occasion pour moi de vous donner des nouvelles de cette "petite" boutique en ligne qui ne cesse de grandir de part son offre, mais aussi et surtout de part sa réputation mêlant sérieux et professionnalisme.

Nicolas : Salut Sylvain. Je te reçois sur mon blog pour parler de ton Shop. Pour mes lecteurs qui ne te connaitraient pas encore (ils doivent être rares !), peux-tu nous faire un rappel de l’historique de ta boutique ainsi que sa philosophie ?

Sylvain : Bonjour Nicolas, merci de m’accueillir.

Voila déjà 7 ans que j’ai décidé d’ouvrir le SC FlyShop sur une idée assez simple, celle de ne proposer que ce que j’utilise pour monter mes mouches. Surement une idée un peu folle, surtout si l'on ajoute à cela le choix d’avoir un  stock suffisant pour pouvoir expédier le plus rapidement possible. Mais après ces quelques années d’activité, je pense que mon idée n’était pas si farfelue que cela.

Nicolas : Au départ très recentré sur le montage de mouches, bien d’autres références se sont ajoutées au fil du temps. Un shop qui devient complet !

Sylvain : Oui, et c’est tout le problème d’être passionné par le matériel. Je ne peux pas m’empêcher d’essayer des nouveaux matériels pour me faire une idée. C’est comme cela que j’ai trouvé un produit pour faire flotter la soie, l’Overton’s Supreme Fly Line. J’avais besoin de changer mes soies, et après des essais de plusieurs références, une soie synthétique Vision Attack que je trouve assez incroyable a été référencée. Cela reste toujours dans la philosophie du Shop : je test, j’utilise...je référence.

Page d'accueil du Shop de Sylvain.

Nicolas : Quelles sont les dernières nouveautés que tu as rentré ? Peux-tu nous en parler, merci.

Sylvain : Je viens de sortir des demi cous de coq qui sont vraiment d’un rapport qualité/prix assez incroyable; le dubbing 100 % lièvre que j’ai fait produire pour le Shop et qui a reçu un accueil enthousiaste; les billes tungstène olive foncée qui ont été peintes à ma demande; la gamme des couleurs de CDC qui s'étoffe. Tout au long des ces années, la gamme d’hameçons s’est étendue aussi pour aujourd’hui proposer 17 références. Pour un petit Shop comme le mien ça commence à être correct J

Notre homme en action !

Nicolas : Travailles-tu toujours pour agrandir ton offre ? En quoi est-on en droit de s’attendre dans les prochains mois ?

Sylvain : Je suis en phase de finalisation pour proposer un nouveau nylon qui sera packagé SC FlyShop. C’est actuellement un axe de travail pour moi de proposer des produits sous ma marque. C’est un peu plus de travail (non en vrai c’est beaucoup plus !!) mais c’est passionnant. Les retours sur mon CDC ou mon dubbing de lièvre me conforte dans cette voie là.

Des nouveautés arrivent dans les semaines à venir, des nouvelles couleurs de billes laiton et de fil de montage, des fibres pour les streamers brochet et réservoirs. Tout cela sera annoncé, comme d’habitude, sur les réseaux sociaux ou sur la page d’accueil du Shop.

J’ai aussi quelques autres  projets "sur le feu" mais les journées sont trop courtes !!!

Ombre normand !

Nicolas : La saison des salons reste bien indécise. Si nous retrouvons une vie normale, où tes clients et les autres auront la chance de te croiser ?

Sylvain : Malheureusement la saison des salons (fin 2020 début 2021) est compromise. Les prochains ne seront que meilleurs pour ces rendez-vous que j’affectionne. Si tout va bien vous pourrez me retrouver au salon de Morigny en région parisienne, Fleurus en Belgique, Carhaix en Bretagne, et j’ai bon espoir de vous retrouver à Muret, et qui sait peut être à Saint Etienne si un jour ma candidature est acceptée !!!

J’ai en projet d’ouvrir mon showroom quand la Covid aura daigné nous laisser tranquille.

Sinon au bord de l’eau :-)

Truite slovène.

Nicolas : Merci Sylvain et surtout, une très bonne continuation. Je te souhaite une pleine réussite pour tes projets à venir.

Sylvain : Merci Nicolas pour ton soutient, et ce depuis le début.

J’en profite aussi pour remercier tous les encouragements que je reçois, les personnes qui partagent les publications ou le lien du SC FlyShop sur les réseaux sociaux et sur les forums. C’est pour un petit Shop comme le mien, qui passe sous les radars des publications papiers, la meilleur des communications. Merci à vous tous.

dimanche 6 septembre 2020

Bill François.

Je vous propose aujourd'hui une nouvelle interview. L'homme que je reçois est réellement passionant. Vous l'avez déjà peut-être vu à travers l'écran de votre téléviseur. Quoi qu'il en soit, je vous invite à le découvrir de ce pas. De nombreux sujets sont abordés et les réponses de Bill sont des plus intéressantes. Bonne lecture.

Nicolas : Bonjour Bill. Très heureux de te recevoir sur mon blog. Peux-tu débuter par une petite présentation s’il te plait.

Bill : Bonjour Nicolas.  J’ai 27 ans, dont plus de 20 ans de pêche! Je suis passionné par le monde aquatique. J’ai fait des études de Physique et biophysique à l’ENS, et travaille actuellement sur une thèse en hydrodynamique, sur les bancs de poissons, à Paris. Par ailleurs, mon autre monde est celui des mots ; j’interviens comme orateur humoriste dans des spectacles et conférences, et j’aime beaucoup écrire.

Mon invité !

Nicolas : La passion des poissons que tu as en toi depuis tout gamin (lu dans ton livre) t-a emmené jusqu’à tes études. Incroyable cette fascination sur la durée pour la vie aquatique. Tu l’expliques comment ?

Bill : C’est un mystère, mais je pense que ça vient du côté invisible du monde aquatique. C’est tout un univers parallèle qui nous est en grande partie caché par la surface de l’eau (sauf parfois avec un masque de plongée ou de très bonnes lunettes polarisantes …). Du coup, ce monde apporte chaque fois des découvertes nouvelles !

Ils craignent le froid les gens de la capitale ;-)

Nicolas : On peut être passionné de vie aquatique sans forcément être pêcheur. Ce n’est pas ton cas. Tu es devenu pêcheur assez jeune également ?

Bill : Oui, pour moi c’était naturel. La pêche apporte un lien très fort avec la nature. Quand on pêche, on n’est plus un simple visiteur étranger ; on a une place dans l’écosystème. On interagit avec la nature et donc on prend conscience du lien qui nous y relie. Et c’est un moyen formidable de découvrir, observer et comprendre le milieu aquatique.
J’ai commencé par chercher des petites bêtes dans les rochers au bord de la mer… et la soif de la découverte m’a poussé toujours plus loin. Ensuite, ça a été la canne au coup, puis le brochet… j’ai commencé la mouche en vacances aux USA, c’est un ami américain qui m’a appris. Une des rencontres qui m’ont le plus marqué. Car la pêche, c’est aussi une formidable aventure humaine de convivialité, de partage et de découverte, qui fait se nouer de belles amitiés.

Magnifique truite à la mouche.

Nicolas : Est-ce que tes connaissances scientifiques peuvent t’aiguiller sur tes décisions durant la pêche pour être plus efficace par exemple ? 

Bill : La science est utile pour pêcher, bien sûr. Bien connaître la biologie du poisson (ce qui peut se faire par la science comme par la simple observation) est très important.
Ou dans des domaines inattendus… par exemple la mécanique nous apprend beaucoup sur le réglage du frein dans les combats. La violence des touches peut augmenter considérablement l’effet du frein, à cause de l’inertie d’accélération. Si on règle son frein au peson il faut donc le faire en tirant brusquement, sinon on le sous-estime. Aussi, plus un moulinet se vide plus l’effet du frein augmente. Un moulinet à moitié vidé double la force du frein. A méditer pendant les combats …

Superbe bec en plein Paris !

Nicolas : J’ai cru comprendre que tu pratiquais toutes sortes de lieux en variant les techniques. C’est important pour toi de te diversifier ?

Bill : La diversité des espèces est une des choses que j’adore à la pêche. Pouvoir vivre des sensations aussi différentes qu’une touche d’ombre à la nymphe, un départ de thon au broumé, une chasse de perches en pleine ville ou des gobages de fario en haute montagne. Le fait de pouvoir explorer autant de biotopes et paysages différents, de créatures variées…  Cela ajoute à l’émerveillement face au spectacle de la nature, et aide à devenir un meilleur pêcheur. Mais je comprends aussi les gens qui se spécialisent dans une pêche précisément ; c’est une façon de vivre sa passion et une philosophie que j’admire.

Magnifique brochet.

Nicolas : On a tous des préférences. Alors dis-moi, eau salée ou eau douce ? Merci d’argumenter ta réponse, je suis curieux de connaitre tes raisons.

Bill : Ah non c’est trop dur comme question ! La mer, c’est la liberté et la grandeur ; l’eau douce, c’est le calme et la poésie. Comment choisir entre les deux ?  Il y a plus de variété de types de pêches en mer, et les poissons sont plus combatifs ; en eau douce on se sent plus absorbé par le milieu aquatique, et celui-ci semble plus familier. Bref, j’adore les deux.

Complètement absorbé.

Nicolas : Une technique préférée ? Un poisson que tu aimes rechercher plus qu’un autre ?

Bill : Je les aime tous, mais si je ne dois choisir qu’une pêche… ce serait, en eau douce, la pêche à la mouche des salmonidés (truite et surtout ombre), qui pour moi a beaucoup de pureté et de poésie. Et en mer, la pêche « au gros » des grands poissons pélagiques au large, surtout le thon, et le marlin au switch bait… j’adore le grand large, qui procure une sensation de liberté immense et apporte toujours son lot de découvertes (mammifères marins, tortues etc). On y fait à chaque fois des observations incroyables.
On a de la chance car en France, nous avons de merveilleuses rivières très variées pour la pêche à la mouche, et de beaux passages de thons pour la pêche au large.

En eau salée.

Nicolas : Pour tes études, tu es basé dans la capitale. Il y a un phénomène anti-pêche qui prend de plus en plus d’ampleur à Paris. Comment juges-tu leur influence sur le reste de la population ? Sont-ils dangereux pour toi à moyen ou long terme ?

Bill : C’est un phénomène marginal, monté par une association végan d’une centaine d’adhérents extrémistes, qui veulent aussi interdire les zoos, la dératisation (en donnant aux rats des contraceptifs !).  Mais ils sont soutenus par des lobbys puissants et médiatisés, et font beaucoup de désinformation. Du coup ils ont une mauvaise influence sur l’image de notre loisir. Mais quand je pêche à Paris je peux vous dire que l’immense majorité des passants sont positifs avec les pêcheurs, et très intrigués et curieux de découvrir ce loisir.

Originale comme photo !



Ce qui m’inquiète c’est la façon dont ces théories « antispécistes » sont amalgamées avec l’écologie. Alors que ça n’a rien à voir ! Les antispécistes ne défendent pas les milieux naturels, les espèces ni les écosystèmes. Par exemple, ils veulent interdire le nokill, car l’idée de risquer de stresser un poisson pour le loisir les choque. Tandis qu’ils ne disent rien contre les pompages sauvages, les barrages, la pollution, la surpêche commerciale ... qui sont eux de vrais problèmes écologiques (et qui font faire souffrir bien plus de poissons... mais bon, les anti pêche ne sont ni écologiques, ni même logiques !).

Évidemment, le gouvernement et les décideurs profitent de cette confusion. Ils font passer pour écologistes des mesures qui sont en fait animalistes, pour se donner une image écolo qui masque leur inaction face aux vrais problèmes écologiques (pollution, pesticides, surpêche, climat...).

C’est tout notre rapport à la nature qui est menacé par les idées végan extrémistes. Pour eux, la nature devrait être une sorte de sanctuaire intouchable dont l’homme serait exclu. C’est utopique et dangereux. Dans un pays comme la France, de multiples écosystèmes ont besoin de l’activité humaine. Et comment des citoyens pourront-ils protéger la faune sauvage si celle-ci est un ailleurs inaccessible, qu’on voit seulement à la télé ? Les sentinelles de la nature sont avant tout ceux qui la vivent.

Nicolas : Quelle réponse le monde de la pêche doit apporter à ces gens ? Doit-on d’ailleurs leur répondre ?

Bill : On ne doit pas trop réagir aux provocations de ces gens; c’est déjà trop donner de place à leur mouvement.

Par contre, il est fondamental que le monde de la pêche fasse mieux connaître son rôle écologique auprès du grand public. Aujourd’hui les associations de pêche sont les seuls responsables de la protection du milieu aquatique, que les pêcheurs financent et assurent eux mêmes directement. Il faudrait que cela soit mieux connu du grand public.

Si le sujet vous préoccupe, avec Numa Marengo, on a organisé sur la chaîne YT Numa Fishing une grande réflexion avec des philosophes, des sociologues, des scientifiques, pour établir quelle est la meilleure réponse et notre positionnement éthique par rapport à l’animalisme.

Superbe poisson.

Nicolas : Plus globalement et dans les grandes lignes, quel  est ton sentiment sur la gestion de la pêche en France, sur ce que fait (ou ne fait pas) notre Fédération Nationale ?

Bill : Le système de gestion de la pêche en France est assez bancal. L’état s’est démis de ses responsabilités de gestion du domaine public aquatique, en laissant les associations de pêcheurs faire tout le travail, gratuitement. C’est un peu comme si l’entretien des routes du pays était confié aux associations de cyclistes.

En parallèle, le code de l’environnement est rempli de lois archaïques, dont certaines datent de l’ancien régime et n’ont jamais évolué ! Beaucoup des mailles en vigueur aujourd’hui datent du roi Charles X, et certaines lois sur la pêche des migrateurs aux engins datent de Colbert ! On devrait pouvoir changer plus facilement des lois qui n’ont plus aucun sens aujourd’hui, comme l’interdiction de la pêche de nuit.

Ce genre d’absurdités existe aussi en mer, où des poissons comme la sériole, les marlins, ou les coryphènes n’ont pas de maille car ils n’étaient pas connus des bureaucrates du 19eme siècle… et rien n’a changé depuis !

Je suis donc émerveillé par la passion et le travail bénévole incroyable de nombreuses AAPPMA qui, malgré toutes les difficultés du système, gèrent brillamment leurs parcours.

Pour ce qui est de la fédération, je suis, disons... plus mitigé. Il faut reconnaître que leur tâche n’est pas facile : ils doivent concilier toutes les différences de culture, de générations ou de mentalités entre les pêcheurs... et se financer en vendant des cartes. Certaines de leurs politiques vont dans le bon sens : mettre l’accent sur le tourisme pêche, sur le lien entre les générations, sur les femmes et les jeunes à la pêche, sur le rôle écologique engagé des pêcheurs...

Mais ils ont encore trop de prises de position lamentables et passéistes. Par exemple, leur proposition de retarder la fermeture de la truite pour compenser le confinement et « amortir le permis » est d’une bêtise inqualifiable.

Leur communication « grand public » reflète bien la vision de la pêche de la Fédé... ils présentent la pêche comme un loisir populaire un peu « beauf », pour se détendre sur une chaise pliante avec une bière en attendant que la truite de bassine fasse couler le bouchon. Ils tentent de faire du populisme pour vendre des cartes. A mon avis c’est une grave erreur, car ils s’aliènent ainsi les pêcheurs les plus passionnés, modernes et influents, toute la nouvelle génération, qui ne se sent pas du tout représentée par cette vision de la pêche. Ce sont pourtant ces pêcheurs passionnés qui sont nos meilleurs ambassadeurs.

A chacun de faire le maximum pour faire bouger cette fédération dans le bon sens !

Du lourd.

Nicolas : Es-tu impliqué dans une structure pêche ? Penses-tu que c’est indissociable avec le fait d’être pêcheur ?

Bill : Ce qui est indissociable avec le fait d’être pêcheur, c’est pour moi l’engagement pour la protection du milieu aquatique. Cela peut se faire via des AAPPMA traditionnelles, mais aussi des associations locales ou internationales, comme la Team River Clean, L’ADRM, l’IGFA, Trout Unlimited, etc.
Je suis impliqué dans diverses structures, qui vont du CA de l’Union des pêcheurs de Paris aux programmes de marquage des thons de la Fédération de pêche de Monaco.

Quand on pêche en eau douce, s’engager dans son AAPPMA est à mon avis important. Si on n’essaye pas de changer le système, il n’est pas légitime de s’en plaindre. La bataille se joue avant tout sur le terrain. Cependant, s’investir dans une AAPPMA exige souvent des horaires incompatibles avec une activité professionnelle… et beaucoup d’AAPPMA sont par conséquent la chasse gardée de retraités qui ont du temps. C’est regrettable, car cela crée parfois un conflit de générations. Il est important de faciliter l’engagement dans les AAPPMA pour les jeunes actifs.

Ombre à la mouche.

Nicolas : Passionné par les poissons, par la pêche, mais aussi par les mots. Tu as remporté sur France2 le grand oral, un concours TV d’éloquence. Cette passion des mots t’es venue de quelle façon ?

Bill : C’est comme la pêche, ça me passionne depuis très longtemps. Je trouve que les mots sont un moyen génial de transmettre des émotions, des idées, par le rire et le divertissement. Et c’est aussi un matériau artistique, comme la peinture, la musique ou la photo. Grâce à des mots, on peut fixer la beauté de la nature et la partager avec d’autres. C’est une manière de célébrer la vie ! On ressent tous cette joie du partage lorsqu’on raconte nos histoires de pêche.

Cherchez France2, le grand oral, Bill François, vous trouverez sa prestation.

Nicolas : Quand on aime les mots, on aime écrire. Ton livre dont j’ai déjà fait le retour ici-même est un régal. As-tu d’autres projets du même genre ou bien dans un domaine assez proche ?

Bill : Oui, beaucoup de projets ! Un deuxième livre bien sûr, mais  aussi dans le domaine des documentaires, et  un spectacle humoristique sur scène quand les théâtres rouvriront dans de bonnes conditions !
Je suis aussi en pleine adaptation de mon livre dans plusieurs langues, et j’aimerais en créer aussi une version illustrée, adaptée pour les enfants.

J'ai adoré !

Nicolas : Revenons à la pêche. Je suppose que tu suis ici et là les actualités parfois bien moroses de certains cours d’eau. Comment vois-tu l’évolution de la pêche de loisir en eau douce dans notre pays ?

Bill : Les problèmes de sécheresse et d’eutrophisation sont dramatiques, sans parler des pollutions…
C’est une tendance générale de perte de la biodiversité qui est catastrophique.
Pour la pêche de loisir, je vois des évolutions qui me rendent plus optimiste. Le no-kill s’est généralisé. Beaucoup d’activités de guidage se développent sur des pêches nouvelles et spectaculaires ! Thons au lancer ou à la mouche, migrateurs, truites sauvages deviennent de plus en plus accessibles et font de notre pays une vraie destination halieutique. La pêche à la mouche se démocratise avec des poissons comme la carpe ou le chevesne qui sont un premier pas vers l’ombre ou la truite.  Beaucoup d’enfants se mettent à la pêche, en particulier dans les villes, où le streetfishing fait émerger une génération nouvelle. C’est frais et positif.
J’espère que cette évolution rendra les pêcheurs encore plus engagés pour protéger la ressource halieutique et les milieux aquatiques.

Bill touche vraiment à tout.

Nicolas : Es-tu déjà venu voir nos zébrées ? Si oui, qu’en as-tu pensé ?

Bill : J’ai eu la chance de découvrir les zébrées avec l’ami Nikola Mandic, sur l’Albarine et la Valserine. C’était un moment génial. Il m’a fait découvrir des parcours splendides et admirablement bien gérés. Les rivières de votre région sont un trésor, largement dignes des plus célèbres rivières du monde entier.
Je n’imaginais pas voir de telles densités de truites sauvages, sur des parcours aussi beaux, ailleurs que dans un rêve. Je n’imaginais pas non plus qu’elles seraient si difficiles ! J’ai appris beaucoup de choses en loupant beaucoup de poissons…  Même les ombres « bleus » sont extrêmement éduqués là-bas. Rien à voir avec mes habituels poissons de Normandie, ou de Haute Seine, qui sont pourtant déjà très méfiants. J’ai hâte d’avoir ma revanche sur ces truites fabuleuses et insaisissables.
J’ai aussi rencontré des zébrées un peu différentes, de souche niçoise, sur la Gordolasque, que m’a fait découvrir l’ami Alex Meyer, de Catch my fly. Des poissons d’altitude de toute beauté !

Une ambiance qui me parle.

Nicolas : Voyageur ? Tu es prêt à aller loin pour pêcher ? A faire des sacrifices pour découvrir d’autres contrées ?

Bill : Ah oui, dès que j’en ai l’occasion, je pars découvrir de nouveaux poissons. Que ce soit dans nos régions de France, ou à l’étranger. J’adore le Maroc, où la pêche du marlin blanc en switch and bait, à vue, est extraordinaire. Pour la truite, j’ai eu l’occasion de pêcher dans le Wyoming et le Montana, régions exceptionnelles. J’aimerais beaucoup découvrir les gros ombres des Balkans et de Scandinavie. Il y a tellement de voyages dont je  rêve…
Mais ce n’est pas nécessaire de partir loin pour faire des pêches exotiques. A quelques heures de train, on peut être tout complètement dépaysé par les chasses de thon du Delta du Rhône, ou les fario de torrent des Alpes !

Outch !

Nicolas : Merci d’avoir répondu à mes questions Bill. Au plaisir de te croiser au bord de l’eau. Beaucoup de bonheur pour la suite.

Bill : Merci à toi Nicolas, et bravo pour tout ce que tu fais pour la pêche à la mouche et pour nos rivières. J’espère qu’on se croisera bientôt au bord de l’eau !

vendredi 15 mai 2020

23 ans de fermeture de l'ombre et maintenant ?

L'ombre sur la haute rivière d'Ain, plus globalement dans le Jura, c'est une longue et triste histoire. Ce poisson emblématique des cours d'eau francomtois est interdit à la pêche depuis 1997. Vingt-trois ans de protection totale pour quel résultat à ce jour ? Une espèce totalement dilapidée de nos rivières jurassiennes et finalement, qui s'en soucie ? Cette situation est tellement tombée dans l'oublie que la plupart des pêcheurs vont finir par oublier que ce poisson était roi sur l'Ain, la Bienne, la Valouse, la Basse Loue et j'en passe...

Il y a 20 ans déjà, et ce même dans les plus hautes sphères de la pêche du département du Jura, la majorité des dirigeants en place n'avaient que faire de l'avenir de ce poisson. Il a fallu se battre comme un beau diable seulement 2 ans après la parution de l'arrêté qui protégeait l'ombre jurassien. 4 ans après, soit en 2001, et malgré un rapport accablant sur les populations existantes, toutes les AAPPMA (sauf une) souhaitaient la réouverture aux prélèvements de ce poisson. Tragique !

Vingt ans après, quand on connait le peu de poissons qui vivent encore dans nos eaux, on imagine facilement que ce vote, s'il avait été validé par les services de l'état, aurait anéanti à jamais les quelques ombres qui survivent dans nos rivières.

Je vous laisse découvrir ou redécouvrir un article paru dans la presse halieutique de l'époque sur le sujet.

Merci Jean-Louis pour cette archive ! Très heureux de constater que les choses ont bien changé depuis toutes ces années où, il faut bien le dire, je me sentais bien seul. Il reste encore aujourd'hui des AAPPMA qui sont dans le déni vis à vis de la réalité, mais globalement, quelle amélioration !

Norbert Morillas, qui est à l'origine de cet arrêté de protection de l'ombre, en serait certainement très heureux. Comme il l'était de m'avoir en soutien à chacun de ses exposés pour défendre ce poisson. Le seul soutien.

Si la réouverture de l'ombre n'a jamais eu lieu, c'est finalement dû à un concours de circonstances. La volonté était là, mais d'après les services de l'état, ouvrir l'ombre voulait aussi dire que l'impact des grands cormorans n'était plus aussi flagrant et que les tirs octroyés tous les ans pour ces oiseaux pouvaient être suspendus. Les présidents majoritaires, à contre cœur, ont choisi de pouvoir continuer à tirer les oiseaux piscivores plutôt que de manger les derniers ombres...Juste incroyable. Les derniers ombres jurassiens ont été sauvés par les cormorans...du moins dans les textes !

Oui, car dans la vraie vie, les quelques noyaux de populations qui vivent ici et là, ne peuvent se développer en autre, à cause de la prédation des grands cormorans doublée depuis quelques années par celle des harles bièvres. Nous avons d'ailleurs le plaisir et l'honneur de vous annoncer notre première nichée sur notre linéaire cette année. Quelle joie ! Une maman harle avec 8 petits qui vont se délecter des 3 ou 4 ombres qu'il reste dans le coin et certainement de quelques truites sauvages au passage...Cette situation devient absurde puisque l'espèce protégée (allochtone) se porte mieux que l'espèce (autochtone) dont elle se nourrit !!! Y'a pas un lézard là ?? Alors c'est bien beau de faire des études et autres comptages depuis 1997, mais il ne faut pas avoir fait de grandes études pour comprendre ce que l'on voit !

Qu'on ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas écrit, je ne pointe pas ces deux oiseaux piscivores comme premiers responsables du déclin des ombres jurassiens à la fin des années 90, mais par contre, ils sont pour moi, aujourd'hui, le premier obstacle à leur recolonisation. L'ombre est le premier touché par cette prédation. La truite se cache, lui reste en pleine eau. Il est confronté tous les jours à cette nouvelle prédation dans l'efficacité est tout simplement redoutable. Sans y être préparé. Sans avoir les armes pour se défendre. C'est dans le contexte actuel, impossible pour ce poisson de faire grandir ses rangs.

Alors laissons faire, et le vote de 2001 sera exaucé. Les derniers ombres jurassiens disparaitront et tout espoir de les voir de nouveau plus nombreux sera anéanti.

- page 3 de 13 -